31/08/2004

Management numérique du territoire

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

Ceux qui comme moi suivent depuis plusieurs années les questions de haut-débit et d’ aménagement numérique du territoire l’on constaté : les colloques et séminaires font (enfin) recette comme jamais ! Fini les ronchons qui tergiversaient sur la réalité des enjeux ou la nécessité d’agir en ce domaine, on en arriverait presque à regretter le bon vieux temps où il fallait se battre face au scepticisme ambiant.
La raison apparente, c’est que le législateur est passé par là. Le mot à la mode c’est “L1425”, l’article de la LCEN [] qui autorise les collectivités à devenir opérateurs. Il a donc fallu faire une loi pour finir de convaincre nos élus, saluons donc les pionniers d’ici qui ont fait honneur à la chose politique avec une vraie “vision” sur ce sujet.
Parallèlement, et ce n’est évidemment pas fortuit, il ne se passe pas un instant sans l’annonce d’un guide sur le sujet à destination des collectivités locales, communes en tête. Il se trouve pour ma part que je de participe à l’un de ces guides, à l’initiative d’un de nos grands ministère. Pour l’anecdote, c’est alors qu’il s’apprêtait à lancer un outil à destination des communes dont l’utilité tient beaucoup à la connexion permanente (donc au haut-débit) que ce ministère s’est aperçu que les communes non desservies étaient quand même nombreuses… Messieurs et Mesdames les Maires, soyez rassurés, vous ne manquerez pas de conseils, j’espère simplement que vous saurez vous y retrouver !

Car, à force de l’entendre et d’en parler, je trouve en effet que aménagement numérique du territoire n’est pas une formule appropriée.

Avec l’aménagement numérique du territoire, on aménage en numérique le territoire. En France, nous aimons bien le goudron et le béton, l’aménagement c’est du concret, ça se vend bien, d’où la tentation de réduire les TIC à des tuyaux voire à des fourreaux. L’important ce n’est pas cela, c’est ce qu’en font (feront) les utilisateurs, dans toute leur diversité.

A force de pédagogie de la répétition, l’idée que la technologie et les infrastructures ne suffisent pas à générer des usages commence (enfin) à être entendue. Du coup, le discours que nous sommes un certain nombre à tenir, sur le registre du dimensionnement des infrastructures en partant de l’usager et sur la durée trouve un certain écho. Il faut d’abord se préoccuper des publics adressés, cela évite notamment de proposer de l’ADSL à des PME alors que celles-ci ont besoin de débit montant ou d’enterrer le Wifi pour du WiMax alors que cette technologie n’existe pas [] Vous n’auriez pas du SDLS à la place par hasard ?
Néanmoins, il ne suffit pas de poser la question, il faut anticiper avec les différents publics, notamment professionnels, les problématiques d’innovation qui les concernent et travailler sur la durée à l’adéquation des services avec les besoins de maintenant, de demain et même d’après-demain.
Je n’aime donc pas trop le terme d’aménagement, trop réducteur et je lui préfère la notion de management qui renvoie à une action durable, avec des outils qui sont avant tout dialogue, concertation et fonctionnement en mode projet.

De quel territoire parle t’on ? Si l’on parle d’usages numériques, de communautés d’usages, associées à un territoire, il faut alors parler de territoire numérique. Il suffit de regarder les galaxies de sites produites par les différents acteurs d’un département ou d’une région et les liens qui les nourrissent pour s’en convaincre.
Territoire numérique, c’est aussi et surtout ne pas oublier qu’il y a plusieurs niveaux de collectivités à agir sur le même espace et que le moins que l’on puisse attendre c’est que ces niveaux se parlent, trouvent leurs rôles respectifs au service si ce n’est d’un projet cohérent, de projets complementaires. Il faut donc saluer une démarche comme Dorsal qui voit les acteurs publics des différents niveaux mettre en commun la problématique numériques pour apporter une réponse convergente et cohérente.
Toutefois, il ne suffit pas de se préoccuper d’infrastructures, cette mise en commun peut et doit aussi s’étendre aux contenus et aux services, publics en premier lieu.
Que l’on ne se méprenne pas. Je ne suis pas en train de militer pour un centralisme forcené, mais pour une vraie interopérabilité et une vraie dynamique de décloisonnement. Nous sommes au XXIe siècle et il est temps de prendre acte de la société de l’information, au sens du mode de fonctionnement collectif qu’elle représente.

Le territoire numérique, ce ne sont pas des tranchés, mais un espace numérique peuplé de personnes qui développent des usages numériques collectivement. Comme cela se conduit durablement, il me semble donc préférable de parler de management du territoire numérique . Cela donne du corps à ce qui est une vraie mission de fonds pour les institutions en charge des territoires.

A l’heure où fleurissent les extranets territoriaux, les consortiums numériques inter-universitaires et autres outils numériques structurants, n’est-il pas temps de penser à sortir information et services de leurs silots ? Cela ne passe que par des démarches collectives, des projets mobilisant durablement des acteurs d’horizons très divers, rassemblés par un intérêt commun, en vue de devenir des communautés d’usages grâce aux fruits de leur action.
Il existe des territoires français où collectivités locales et institutions ont su dépasser la vision infrastructure pour mettre en commun une ambition numérique pour leur territoire, faites de services et de contenus gérés en cohérence, sans renier les identités et le rôle de chacun.
Ces sujets ne sont pas limités aux seuls acteurs publics. Comme entreprise TIC, nous sommes aussi acteur du territoire numérique. Nous avons des choses à dire et à proposer. Nous sommes prêts à contribuer.

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