30/10/2006

Trop d'outils, pas assez de services

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

L’automne est propice à un certain désenchantement et même si c’était attendu, c’est un peu ce qui est en train de se passer en ce qui concerne la génération de services en ligne actuels. On comment à trouver qu’il y en a trop, qu’ils ne sont pas convergents entre eux, qu’ils ne donnent pas vraiment la maîtrise de ses données à l’utilisateur, qu’ils l’obligent à démultiplier les moyens et les fins, bref qu’ils sont plus centrés sur eux-mêmes que ceux auxquels ils sont destinés. Nous avons beaucoup joué, beaucoup apprécié, on ne peut plus s’en passer, mais maintenant on commence à être agacé par les défauts. Quelqu’un a-t’il le numéro du SAV ?


Ne sommes nous pas submergés par les outils ? c’est la question que l’on se posait avec Jean-Luc l’autre jour, en évoquant en particulier le billet de Fred Cavazza sur l’identité numérique et notamment ce tableau. Vous aussi, allez-y, rajouter les logos des services concurrents de ceux qui s’y trouvent et faites le compte.
Pour ma part, je constate que mon “cimetière à outil”, celui où se trouvent tous les services sur lesquels j’ai ouvert des comptes et dont je ne me sert plus, est bien garni. Suis-je quand même comptabilisé dans ces chiffres astronomiques de nombre de clients publiées à longueur de journée ? J’en ai bien peur. Au même titre que le nombre et les classements de blogs, sans parler de la mesure d’audience, il commence à y avoir de sérieux doutes sur la fiabilité des évaluations. Personne ne peut nier la massification des usages et des utilisateurs, mais c’est quand même embêtant de manquer de certitudes, surtout d’avoir des tendances fiables. En général, l’économie n’apprécie pas trop que perdure cette situation.
Nous sommes hyper-outillés et qui plus est avec pléthores de doublons, notamment en ce qui concerne les réseaux sociaux, simplement par le fait qu’il est difficile de passer à côté du service utilisé par tel ou tel proche avec lequel on veut maintenir les échanges et que, on se retrouve en panne d’interopérabilité. Le web 2.0 a beau être perclus d’APIs, ce n’est pas pour autant que les services partagent des moyens standard de portage des données. Que ce soit Flickr, NetVibes ou SalesForces, ils développent tous leur écosystème de développement pour que les autres services soient couplés avec eux, mais comme tout le monde joue ce jeu et qu’aucun système n’est basé sur des standards communs, on se retrouve avec du service-centric plutôt que du user-centric. Ça n’a rien à voir avec de la techno ou des usages, c’est une question de mimétisme dans le positionnement et le modèle à un stade de développement de la vague qui privilégie l’acquisition de clients et la compétition pour être le plus vendable que le développement de la qualité de service.
C’est ce que souligne Hubert dans un billet très commenté et très représentatif par ailleurs d’une part que personne ne parle de la même chose en parlant du “web 2.0” et que par ailleurs les services “labellisés” “web 2.0” ne respectent pas les principes même du “web 2.0”. L’utilisateur ne maîtrise pas ses données et doit démultiplier leur dépôt et leur gestion sur le net.
Tout cela me fait furieusement penser à la messagerie instantanée, à l’époque où il fallait avoir autant de logiciel que de service de chat. Tout ça est derrière nous heureusement, grâce aux bons soins de la concentration économique et d’un effort sur les standards.
Hubert a furieusement raison de souligner que le petit monde du web 2.0 doit se bouger pour sortir du foisonnement et commencer à travailler sur la convergence afin de faciliter la vie des utilisateurs. Etre user-centric, ça doit considérer que les gens sont déjà outillés et qu’ils en ont peut-être marre de démultiplier les comptes et le temps passé à y déposer des contenus.
Tout ces sujets sont caractéristiques de l’entrée du “web 2.0” dans la phase de consolidation qui suit le pic des attentes dans les cycles d’innovation. Puisqu’il ne semble pas que de nouveaux services viennent bousculer l’ordre établi en jouant le jeu de la fonction export et du portage des données, nous devrions donc en rester là et voir l’offre se resserrer, avec Google au centre d’une concentration qui, sur ce point, a débutée.
En fin de compte, j’en viens à penser que si la génération actuelle de services ne s’est pas pleinement inscrite dans la vision du web 2.0, qui n’était rien moins qu’une revisitation de celle du web originel, il faut prendre acte de ce que représente cette génération et trouver un autre mot pour parler de ce vers quoi le web devrait tendre, d’autant plus qu’aujourd’hui, à être sémantiquement collés, il n’y a plus de distance d’avec l’objectif et la flèche n’est tout simplement pas plantée au centre.

gallery image